L’assainissement traditionnel en Asie Enregistrer au format PDF

Durant plus de 4000 ans en Chine, en Corée et au Japon, les excréments humains furent utilisés pour fertiliser les champs [1]. Lao Tseu énonçait : "Accepter toutes les immondices du royaume, c’est être le seigneur du sol et des céréales." [2]

Un témoignage important sur l’agriculture asiatique traditionnelle a été diffusé en occident par l’agronome américain Franklin H.King qui a publié en 1911, un ouvrage intitulé "Farmers of forty centuries" [3]. Lorsque il visite la Chine, "la population est estimée à 400 millions d’adultes, à comparer aux 400 millions d’européens«  [4]. King a pu observer comment dans une ville comme Shanghai, les excréments humains étaient collectés manuellement »via un réseau de canaux spécialement conçus, ou circulaient plusieurs centaines de barques." [5] Le fumier humain était généralement intégré au sol puis recouvert de terre.

Il est frappant de constater la valeur économique des excréments humains à l’époque. Pour l’illustrer, King relate qu’en 1908, un chinois avait versé 31000$ en or à la ville de Shanghai pour obtenir le droit de collecte de 78 000 tonnes de fumier humain par an [6]. "Au Japon, les gens payaient un loyer moins cher quand ils laissaient à leurs propriétaires des excréments en plus grande quantité." [7]

Joseph Orszagh affirme que les chinois ne compostaient pas leurs excrétas? [8] et que par conséquent leur pratique diffère des principes actuels de l’assainissement écologique. Toutefois, King fait état au Japon de « Compost House » [9] dans lesquelles sont compostés les fumiers combinés avec foin, paille, divers déchets, terre et boue.

Les matières séjournent dans un côté de la « maison de compostage » de 5 semaines en été à 7 en hiver, puis sont déplacées dans la partie opposée où elles continuent à composter avant d’être intégrées aux terres agricoles.

Il s’agit certes d’un compostage très partiel, assez éloigné de ce que nous préconisons aujourd’hui et il est probable que les conditions de manutention et de valorisation agricole aient pu causer quelques problèmes sanitaires. Toutefois, ce système asiatique de valorisation agricole des excrétas humains a perduré de longues années (et persiste dans certaines régions rurales) et n’a été abandonnée qu’en raison de l’exportation des engrais de synthèses par les occidentaux.

La longue existence de ce système a probablement marqué la culture chinoise qui bien qu’occidentalisée est restée moins fécophobe, comme en témoignent les récents projets urbains d’assainissement écologique.

[2Lao-Tseu, Tao-Tö King, 78e chapitre.

[3Franklin H.King, Farmers of fourty Centuries, 1911.

[4Kris De Decker, op. cit.

[5Ibid.

[6Franklin H.King, op. cit., p.9

[7Kris De Decker, op. cit.

[8Voir sur le site de J.Orszagh.

[9Franklin H.King, op. cit., p.211-213

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